PORTER LES TÉPHILINES SUR LE BRAS GAUCHE

On attache les téphilines sur le bras gauche. Le Talmud (Mena‘hot 37a) donne à cela trois raisons :

1) Il est écrit : « Tu les attacheras [ces paroles] en signe sur ton bras. » (Dt 6, 8) Or quand la Bible parle de « bras » (yad) sans autre précision, c’est le bras gauche qu’elle désigne, ainsi qu’il est dit : « De sa main, elle saisit le pieu ; de sa droite, le marteau des ouvriers. » (Jg 5, 26)

2) La Torah dit : « Tu les attacheras en signe sur ton bras, et elles seront une parure entre tes yeux. Tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes. » (Dt 6, 8-9) Nos sages enseignent que la Torah établit ici un parallèle entre le fait d’attacher et le fait d’écrire : c’est de la main même qui sert à écrire le parchemin de la mézouza qu’il faut attacher la téphila du bras. Puisqu’il est habituel d’écrire de la main droite, c’est celle-ci qui doit attacher la téphila sur le bras gauche.

3) Il est écrit : « Et ce sera un signe sur ton bras… » (Ex 12, 16). Or le mot yadekha (« ton bras ») est écrit de manière inhabituelle, avec un final (ידכה au lieu de ידך). Les sages apprennent de cet ajout que la téphila doit être portée sur le bras faible (יד כהה), c’est-à-dire le bras gauche.

Si l’on a attaché la téphila à son bras droit au lieu du gauche, on n’est point quitte de son obligation.

Cas du gaucher

Environ dix pour cent des gens sont gauchers. Si l’on est gaucher, on attachera la téphila sur le bras droit, car c’est ce bras-là qui peut être qualifié de « faible ». Certes, selon le Méïri et les cabalistes, le gaucher lui-même doit porter sa téphila sur le bras gauche. On suit à cet égard ce qui est « gauche » pour la majorité des hommes ; de plus, nos sages spécifient que la téphila doit être placée « en regard du cœur », or le cœur est orienté vers la gauche. Mais la presque totalité des décisionnaires estiment que le gaucher doit porter la téphila sur son bras droit, puisque la mitsva ne consiste pas à l’attacher au bras gauche, mais au bras faible ; puisque le bras faible du gaucher est le droit, c’est sur lui qu’il doit attacher la téphila. En revanche, l’ambidextre (qui maîtrise également les deux mains) mettra la téphila sur le bras gauche, comme la majorité de ses semblables (Mena‘hot 37b).

Un soldat amputé du bras

Le soldat combattant Jonathan Méïr Maatuf, qui a pris part à l’élimination de nombreux terroristes, a été grièvement blessé il y a quelques mois, et son bras droit a été amputé jusqu’au coude. Jonathan est gaucher, de sorte que sa téphila s’attache sur le bras droit. Avant même son évacuation héliportée, il demanda au médecin, homme pratiquant, s’il pourrait continuer de mettre la téphila à son bras droit. Le médecin lui répondit qu’il resterait à son bras la zone d’application des téphilines, et Jonathan en fut très heureux et ému. Actuellement, il suit une rééducation. Que l’Éternel lui donne le mérite de fonder une magnifique famille, et d’exploiter ses talents dans le domaine de l’ingénierie, pour la plus grande gloire de la Torah, du peuple et du pays.

Si l’on n’est pas entièrement gaucher

On trouve un à deux pour cent de la population qui ne sont réellement ni droitiers ni gauchers : ils écrivent d’une main, mais c’est l’autre qui est leur main forte. On trouve à leur sujet trois opinions :

1) Certains décisionnaires pensent qu’une telle personne doit attacher la téphila sur son bras faible (Terouma, Roch, Mordekhi, Gaon de Vilna, ‘Aroukh Hachoul‘han 27, 16).

2) Selon d’autres, on attachera la téphila sur le bras dont on ne se sert pas pour écrire (Beit Yossef, tel que l’expliquent le Séfer Mitsvot Qatan et Rabbénou Ye‘hiel ; Choul‘han ‘Aroukh 27, 6 ; Maguen Avraham ; Choul‘han ‘Aroukh Harav I).

3) D’autres enfin estiment que, tant que l’on écrit de la main droite, ou que celle-ci est dominante, ou qu’on l’utilise encore pour accomplir plusieurs tâches importantes, on est considéré comme ambidextre : on attachera donc la téphila sur le bras gauche (Tossephot Rabbénou Pérets, Baït ‘Hadach, Artsot Ha‘haïm, Ben Ich ‘Haï).

Selon le Yabia’ Omer (VI, Ora‘h ‘Haïm 2), le critère déterminant est l’écriture ; mais, en raison du doute, on attachera également sa téphila à la main opposée, après l’office. L’Igrot Moché pense, en revanche, que l’on ne saurait donner pour instruction de lier ses téphilines aux deux bras, « car, dit-il, ce serait un grand effort, et nous ne voyons pas que les livres de nos maîtres aient jamais donné un tel conseil ».

Halakha pratique

Il convient que chacun suive les instructions de son rabbin. Mon avis penche dans le sens de la troisième opinion : tant que l’on écrit de la main droite, ou que celle-ci est la main forte, ou tant que l’on exécute de cette main des tâches importantes, on attachera la téphila sur le bras gauche, ainsi que l’écrit notre maître le Rav Mordekhaï Elyahou, de mémoire bénie, dans sa lettre de recommandation à Pniné Halakha (5753 / 1993). Cette position semble juste, car en tout cas de doute, lorsqu’on donne pour instruction d’attacher la téphila au bras gauche, on s’aperçoit, à bien examiner la littérature des Richonim, que tel est en réalité leur avis majoritaire. De plus, telle est la conduite recommandée par la Cabale. Il faut ajouter à cela les auteurs selon qui, a posteriori, un gaucher qui aurait attaché sa téphila au bras gauche serait quitte.

Par ailleurs, en général, dans les cas où l’on hésite à dire si une personne est gauchère, il est rare qu’une opposition nette existe entre écriture et force. Par conséquent, ceux-là mêmes qui veulent se fonder sur l’un ou l’autre de ces deux critères sont sujets à de grands doutes. Or la Torah n’a pas formulé ses paroles de façon à engendrer d’innombrables cas d’incertitude. Pour sortir du doute, la solution consiste donc à dire que, dès lors que l’on est quelque peu adroit de la main droite, on doit être considéré comme ambidextre : on attachera donc la téphila à son bras gauche. De plus, parmi ceux qui pensent que le critère essentiel est, en cette matière, l’écriture, nombre d’auteurs reconnaissent que, si l’on est naturellement droitier, et que l’on se soit habitué à écrire de la main gauche, c’est sur le bras gauche que l’on attachera la téphila (Maguen Avraham 27, 10 ; Michna Beroura 27). Il est en pratique difficile de savoir pourquoi telle personne, dont la main dominante est la droite, écrit cependant de la main gauche. Peut-être s’y est-elle habituée pour quelque motif extérieur, par exemple : avoir siégé, à l’école, à la gauche d’un élève qui gênait l’usage de sa main droite ; ou bien encore, avoir eu quelque blessure à la main droite, lorsqu’on commençait d’apprendre à écrire.

Traduction : Jean-David Hamou


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